Restauration du centre de contrôle Scalextric K/703
par Jean-Michel Piot
Les kits de bâtiments
Scalextric que l’on peut trouver sur des sites de ventes aux enchères ou dans
des bourses d’échanges sont désormais quasi introuvables en boîte non montée.
Or le problème
des kits déjà montés et peints est que ceux-ci sont la plupart du temps très
mal peints pour ne pas dire plus, souvent avec des peintures brillantes
inappropriées, parfois mal montés et, du fait du temps qui s’est écoulés,
quelques fois incomplets ou endommagés.
Le centre de
contrôle qui illustre cet article est un parfait exemple de pièce intéressante,
achetée sur e-bay et hélas peint et monté en dépit du bon sens. Le vendeur
annonçait qu’il y avait quelques petites erreurs de peinture mais rien de
plus … et que l’horloge manquante était certainement identique à celle de
la tour de contrôle … Propos de dangereux iconoclaste ! Pour autant,
j’ai été fou de joie d’emporter l’enchère à un prix tout à fait intéressant,
confiant que j’étais quant à la possibilité de redonner son lustre à cette
magnifique pièce de collection.
Pour savoir
de quelle couleur le bâtiment sera repeint, si l’on est soucieux de
l’origine, il convient de se reporter aux catalogues d’époque, plus
particulièrement de mon point de vue ceux des années 60, les catalogues du
tout début des années 70 introduisant en effet des couleurs plus à la mode
pour sans doute « rajeunir » des produits déjà anciens, mais pas
idoines compte tenu du style des bâtiments.
On observe
sur la photo du centre de contrôle, avant sa restauration, que la façade
du rez-de-chaussée est peinte intégralement en rouge au lieu d’être blanche
(sauf à l’endroit des briques), que le toit est bleu au lieu d’être noir,
que la peinture est de manière générale mal appliquée et bave. C’est
crime, à ce stade, que de laisser les pinceaux et peintures en vente libre ! :0))
Par contre,
certains éléments ne sont pas peints. Ainsi en est-il des planches du bureau
à l’étage supérieur, des accessoires sur ces planches et de la banquette du
dernier étage, du haut des balustrades et des sols.
S’agissant
des erreurs de collages, les jardinières de fleurs sont collées au niveau des
entresols au lieu d’être fixées au bas des rambardes. Une encoche est
d’ailleurs prévue dans les jardinières. De plus, une jardinière est collée
au centre au 2e étage, au lieu d’être sur le côté, une autre
rambarde n’étant pas non plus à sa place. Là encore le recours aux
illustrations des catalogues est précieux, à défaut de plan de montage.
C’est ainsi que l’on s’aperçoit que le toit est collé à l’envers, la glissière supérieure prévue pour la porte coulissante se retrouvant vers l’avant et non vers cette porte, l’horloge (ou tout du moins les encoches du toit prévues pour repérer et faciliter sa fixation) se retrouve déportée vers l’avant, alors qu’elle doit être au fond du bâtiment.
Enfin, il
manquait sur la pièce reçue l’horloge et le drapeau, remplacé en attendant
par une horloge de tour de contrôle.
En aparté, on remarque ainsi sur le document illustrant l’état avant restauration, que William Plouchester junior, photographe Scalextric de son état (on est dans le métier de génération de scalextriqueur en génération de scalextriqueur chez les Plouchester, le grand père en 1930 travaillait à la chambre folding à plaques sur le circuit de Brookland) refuse de prendre le bâtiment en photo avec son énorme browning collé sur le ventre, le trouvant indigne de son art, et s’est réfugié sur le toit de la tour de contrôle malgré les appels à la raison d’autres personnages Scalextric. Il fallait intervenir !
Le premier
travail, et l’unique si seule la peinture pose problème, consiste à retirer
cette peinture.
On peut le
faire avec des lames de cutter si l’on a du doigté. Mais la solution la moins
agressive consiste à faire tremper le tout pendant une journée dans du liquide
de frein, en brossant de temps à autre avec une vieille brosse à dents. Prenez
plutôt des gants et mettez des lunettes car le produit est irritant. Il attaque
la peinture qui se décolle en petite particule mais laisse le plastique intact.
Je suis rassuré à ce propos, quand je considère que le bocal de liquide de
frein de mes voitures de piste à échelle 1 est lui aussi en plastique…
Une fois
toute la vieille peinture retirée, il faut bien dégraisser le tout. Du liquide
vaisselle et de l’eau, tout en brossant, permettront de retirer toute trace.
Pour les éléments
mal collés et/ou à déplacer, le problème est plus crucial. La technique que
j’ai adoptée a consisté à décoller en force (modérée) ce qui pouvait
l’être avec un cutter, là où les collages n’étaient pas trop solides. Il
convient, comme en dentisterie, de prendre des appuis avec plusieurs doigts pour
ne pas risquer de se blesser gravement. Ce qui résistait a été trempé dans
du White Spirit, avec des tentatives, de temps à autre, d’insérer une lame
de cutter. Il ne faut pas faire tremper trop longtemps car cela ramollit le
plastique.
Heureusement,
ce sont les zones de collage qui cèdent en premier.
Pour détacher
les balustrades, fichées dans les plafonds avec un tenon collé dans un trou,
on peut travailler depuis l’intérieur du plafond, en appuyant délicatement
sur chaque tenon et, si certains ne cèdent pas, forer au diamètre du trou avec
précaution, en n’allant pas plus loin que nécessaire.
Si trop de
tenons ont été ainsi sacrifiés, on peut forer les piquets ronds où étaient
les tenons et ficher ensuite à l’endroit du trou un autre élément
cylindrique qui remplacera le tenon.
Pour
travailler avec précision, il est indispensable de faire un avant-trou à la
main ou à petite vitesse avec une fraise conique très fine ou un foret de
quelques dixièmes de millimètre de diamètre.
Après avoir
retiré des balustrades et les murs, on risque fort de se rendre compte que des
surplus de colle forment des bosses disgracieuses sur le plan des terrasses. Il
faudra poncer la surface pour éliminer ces défauts de surface.
Le centre de
contrôle a ainsi pu être démonté partout où il devait l’être pour
refaire correctement le montage.
Il faut savoir que j’ai ainsi récupéré des jardinières en plusieurs morceaux et des trous à certains endroits, sous les rambardes, là où les jardinières étaient collées par erreur.
Heureusement,
avec les enduits époxy modernes (plus qu’avec les enduits qui ont tendance à
creuser en séchant) et une bonne colle liquide pour maquette plastique (en
petite bouteille avec une aiguille, pas en tube !) on fait des miracles.
L’enduit époxy
bi composants Tamiya est parfait pour l’usage. L’enduit Milliput, bi
composants également, est aussi très bien adapté.
On remarquera
que pour bien coller 2 pièces plastique entre elles, il faut que les surfaces
soient exemptes de peinture, de toute trace de vielle colle, quitte à refaire
la surface avec des limes fines. Dans le cas de cette restauration, de nombreux
plans de joint ont été ainsi retravaillés à la lime. Le collage des
escaliers contre les murs impose de positionner « en blanc », de
marquer à la jonction avec une pointe sèche, et de gratter l’apprêt blanc
en deçà de cette marque afin d’obtenir une zone de collage exempte de
peinture. Il faut ensuite mettre un peu de colle (pas trop) sur chacune des 2
surfaces à coller (et non sur une seule) et attendre environ 10 à 15 secondes
avant de mettre en contact. Le plastique en surface va ainsi réagir avec la
colle pendant ces quelques secondes et la réunion immédiatement ultérieure
des 2 pièces va créer une fusion des matières qui seule assurera la solidité
de l’assemblage. Si un minuscule bourrelet apparaît à la ligne de jonction,
c’est bon signe, cela montre que la fusion opèrera. Ce bourrelet sera retiré
à la lime ou au cutter après séchage complet (ou en cours de séchage si on
en a l’expérience). À force de pratique, l’intelligence descend dans les
doigts. C’est bien, ça repose la tête :0))
Si des parties sont trop endommagées pour pouvoir être réparées au mastic bi composants ou à l’enduit, il est possible de découper de façon franche (avec un disque de scie) la partie cassée et de la refaire en éléments en polystyrène, des fabricants tels « Ever green » fournissant aux magasins de modélisme spécialisés toutes sortes de plaques ou profilés en polystyrène.
Après avoir
restauré la structure, je conseille de tout peindre à l’apprêt blanc Tamiya
en bombe. Attention, cet apprêt existe en gris et en blanc, c’est le blanc
qu’il faut utiliser.
L’apprêt,
une fois bien tendu par le séchage, gommera certains défauts superficiels
(bien plus que ne le ferait une bombe de peinture blanc mat) et montrera les éventuels
derniers endroits où du mastic ou enduit sera à nouveau nécessaire afin, après
ponçage, d’obtenir le résultat escompté.
Après cette
étape, une seconde couche d’apprêt sera nécessaire, sinon 2.
Pour gommer
les éventuelles imperfections de l’apprêt en bombe, pour lisser le mastic ou
l’enduit, mais aussi pour redonner le cas échéant une
certaine jeunesse à un plastique jauni par les UV et que l’on veut
garder non peint (comme à l’origine pour les bâtiments qui n’étaient pas
vendus en kit), on peut poncer au papier de verre gradation supérieure ou égale
à 1000. Tamiya propose du papier de verre de 1000 à 2000.
Je conseille
ensuite, pour l’application de la peinture, de limiter au maximum
l’utilisation du pinceau (on voit déjà les ravages antérieurs, ne faisons
pas de même, pensons à notre descendance…) et de privilégier les bombes ou
mieux encore de peindre à l’aérographe, en masquant au préalable les zones
à préserver de la couleur avec du « masking tape » Tamiya aux
limites et avec du scotch et du papier au-delà. Ne pas utiliser de papier
journal, l’encre peut laisser des traces.
C’est ainsi
que non seulement les portes et fenêtres démontées ont été peintes, mais
aussi les encadrements de fenêtre et le haut des balustrades. Il vaut mieux
consacrer quelques dizaines de minutes à ce travail de masquage et contempler
avec satisfaction le résultat une fois la peinture parfaitement sèche et les
éléments de masquage retirés, que d’avoir à supporter un résultat médiocre
pendant des années.
Personnellement,
j’ai considéré que l’âge et la rareté du centre de contrôle imposaient
un travail méticuleux. Il s’agissait de préserver un patrimoine que diable !
S’agissant
du choix des peintures, ma préférence va vers les peintures pour maquette
plastique en petit pot Humbrol (ou Testors), qui tiennent mieux et sont moins épaisses
que les peintures acryliques, même si on applique la peinture à l’aérographe,
donc diluée.
À ce propos,
j’ai utilisé pour le vert moyen des balustrades un aérographe et un
compresseur. Des bombes d’air pour aérographe conviennent aussi et sont moins
onéreuses si l’on ne peint pas très souvent. Les toitures et les terrasses
ont été peintes en noir mat à la bombe Tamiya, le noir mat ayant, après séchage,
été légèrement lustré au chiffon lui donner un aspect très légèrement
satiné (ou moins mat). Cette dernière technique donne un effet de matière très
réaliste si l’on a peint d’abord une première couche pour l’uniformité
puis, après séchage de celle-ci, que l’on a pulvérisé finement la peinture
en brouillard (petites touches successives, en tenant la bombe un peu plus éloignée
le cas échéant), qui forme ainsi de minuscules gouttelettes, simulant
l’aspect granuleux des toits en goudron. Procéder à des essais.
Le pinceau
sera utile seulement pour les fleurs des bacs et le marquage « Scalextric »
sur la balustrade frontale du dernier niveau, à soigner tout particulièrement
(boire un peu de whisky avant (mais pas trop) et écouter Kind of Blue de Miles
Davis pendant, ça aide).
C’est au
pinceau également que seront peints les
détails intérieurs de ce dernier niveau.
Pour les
plantes des jardinières et la banquette, je conseille de tout peindre d’une
couleur plus foncée puis, une fois la peinture de fond bien sèche,
d’effleurer la surface avec une peinture plus claire, le pinceau étant
presque sec. Ce truc bien connu des figurinistes, donne ainsi du relief et
compense la faiblesse des ombres du fait de la réduction à l’échelle.
À propos de
ces jardinières, j’ai vu trop souvent dans les bourses ou sur les centres de
contrôle en vente sur les sites d’enchères, les fleurs peintes n’importe où
et en trop grand nombre.
Or si l’on
regarde de près les jardinières, surtout quand elles sont non-peintes ou
uniformément blanches du fait de l’apprêt, on se rend compte que les pétales
et centres de fleurs sont en relief.
Le respect de
l’origine incite à respecter les emplacements prévus.
Le tour de la
banquette, imitation bois et la partie la plus en relief des bourrelets de la
banquette (les côtes) peuvent être vernis avec un vernis satiné. Pas les
creux si l’on veut donner de la patine.
Les briques
du premier niveau seront traitées de la façon suivante : faire d’abord
un « wash » de peinture gris clair mate, c’est-à-dire une
peinture très diluée au White Spirit. Le mélange va s’insinuer très vite
entre les briques.
Le bord des
briques, à l’encadrement de la porte et dans les angles du bâtiment, est à
peindre du même gris, non dilué cette fois. Voir les photos.
Il ne reste
plus qu’à peindre les briques d’une couleur uniforme de jaune légèrement
orangé puis de retoucher les briques les unes après les autres pour y
introduire des nuances de rouge et de brun, de violet même parfois, avec peu de
peinture et en étant léger sur le pinceau.
Le résultat
vaut bien le temps qu’on y passera, d’autant qu’il n’y a là aucune
difficulté technique, il faut juste de la patience …
Si le bâtiment a vocation à être souvent déplacé donc manipulé, il vaut mieux vernir légèrement les briques, dont la peinture est fragile car appliquée finement, avec un vernis mat ou à la limite satiné, acrylique cette fois (peinture acrylique Tamiya par exemple) afin de ne pas risquer de diluer la peinture du dessous lors de l’application du vernis.
Petite
entorse à l’origine, mais aussi pour solutionner un défaut de planéité du
plafond du rez-de-chaussée, j’ai découpé une plaque de polystyrène de 3mm
d’épaisseur à la dimension exacte de ce que serait le sol intérieur du 1er
niveau. J’ai arasé sur le toit, avec une petite meule montée sur
mini-perceuse, les encoches prévues comme repères de positionnement, pour
permettre à ce « socle » d’être collé. L’avantage est
multiple : le toit est désormais plat, le 1er niveau s’emboîte
parfaitement, sans jour ou lumière entre le plancher et les murs ; par
ailleurs les plans des 4 murs sont désormais parfaitement orthogonaux avec les
murs immédiatement voisins et ne subissent plus de déformation « en
coussin ». Enfin, pour le 1er niveau, le seuil de la double
porte se retrouve au niveau du sol intérieur, ce qui est infiniment plus réaliste.
J’ai fait
de même pour le 2e niveau et ai, pour la beauté du geste, recouvert
ces socles de lattes de bois (voir au rayon bois des magasins de modélisme).
Cela fait de très beaux planchers.
Pour le rez-de-chaussée, j’ai utilisé du carton plume épais (fourniture de magasins de beaux-arts, utilisé par les architectes pour leurs maquettes) peint en gris clair mat et au pinceau cette fois, pour figurer un sol en ciment, plus rustique que les parquets des étages. Là encore, positionner ce plancher au même niveau que le seuil de la porte à double battant, ajoute au réalisme.
J’ai aussi
choisi de monter les jardinières sur crochets plutôt que de les coller définitivement.
On peut ainsi choisir de les mettre ou non, suivant la saison pourquoi pas.
Pour cela on
met en place sans coller (montage « en blanc ») les jardinières et
l’on marque avec une mine de porte-mine la plus fine possible l’emplacement
de minuscules trous de forêts où seront placées des tiges en cuivre (issus de
câbles électriques) qui, peints en blanc, seront recourbés en position contre
les montants en « V » des balustrades. 2 ou 3 crochets par jardinière
suffisent.
Sur les photos, la jardinière supérieure gauche est de guingois. Je n’ai pas fait attention en déplaçant le centre de contrôle et un crochet n’est pas complètement engagé, mais une fois bien descendue, cette jardinière est parfaitement droite.
On remarquera
que je n’ai pas choisi de faire des vitres en Rhodoïd, dans le souci du
respect du jouet d’origine. On peut être d’un autre avis, surtout
s’agissant de maquettes à monter où le monteur a davantage de latitude pour
détailler.
À noter que
ce centre de contrôle est encore partiellement démontable : le 1er
et le second niveau pouvant se déboîter, ainsi que l’horloge. Ainsi, si
l’on veut placer des personnages, prévoir un éclairage, ou même transporter
ou ranger plus aisément, c’est encore possible.
Je me demande
toutefois si le choix d’éclairages internes ne nécessiterait pas que tous
les murs soient peints en noir mat, pour opacifier le plastique, avant d’être
à nouveau peints en blanc avec plusieurs couches d’apprêt. Ceci éviterait
sans doute d’avoir des parois translucides. Je n’ai pas d’expérience en
la matière.
Dernier détail,
particulier ici du fait qu’ils manquaient, l’horloge et le drapeau ont été
recréés avec des plaques et profilés en polystyrène « ever green ».
Ce sont des photos de détail sur un centre de contrôle en vente sur e-bay qui
ont servi de référence, le report des mesures et une règle de trois
permettant de retrouver les dimensions exactes en se basant sur une mesure réelle
prise sur le bâtiment. Les cadrans ont été faits à l’ordinateur et imprimés
sur une feuille d’autocollant blanc.
L’impression
des cadrans apparaît un peu pâle et pourrait être améliorée (et le sera),
mon imprimante de bureau étant en panne lors de la réalisation, j’ai dû
utiliser ma petite imprimante de voyage. Ces cadrans seront donc décollés et
remplacés. On lira ainsi mieux la marque de la pendule, ajoutée en clin d’œil :
Bell & Ring. Certes, ce n’est pas d’origine…
En tout cas, le résultat est bien plus plaisant, la foule revient, il y a même (voir photo des personnages) du monde au balcon ! L’œil est satisfait, les photographes reviennent, nous sommes sauvés.
Scalextriquement vôtre, Jean-Michel PIOT
©2000-2005 ScalexSite . Tous droits réservés . c.couvrat@free.fr